Basango-ya-Brazza.

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Naissances multiples, pauvreté aggravée

(CRP/Syfia) Au Congo Brazzaville, rares sont les couples à utiliser des moyens de contraceptions. Les femmes ont parfois ainsi plus de 6 enfants. Autant de bouches difficiles à nourrir…

 

"Au quotidien, la vie est devenue chère. Nous n’arrivons plus à nourrir, ni à scolariser nos enfants. Mon mari et moi avons donc décidé d’utiliser un moyen de contraception. Je vais prendre la pilule, car nous allons être encore plus pauvres à force de faire trop d’enfants... Mieux vaux nous arrêter là", explique Aline Légnoki, la quarantaine révolue,  déjà mère de neuf enfants. Aline est agricultrice à Mossaka (département de la Cuvette) à plus de 400 km au nord de Brazzaville. Elle était de passage dernièrement dans la capitale pour une consultation, avec son mari, au quartier Plateau des 15 ans, à la clinique de l’Association congolaise pour le bien-être familial (ACBEF).

Comme Aline, au Congo bon nombre de femmes utilisent jusqu’ici peu les méthodes contraceptives qui limitent les naissances. Zéphirin Abel Moukolo, directeur des programmes de l’ACBEF, précise : "A Brazzaville et à l’intérieur du pays, seule une femme sur cinq les utilisentet moins d’une sur deux a recours aux méthodes naturelles (respect du cycle menstruel, coït interrompu, Ndlr)." Des calculs approximatifs et des comportements qui multiplient les risques de grossesses incontrôlées. Selon une enquête démographique et de santé réalisée en 2011-2012 par le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), le taux de fécondité était de 4,5 enfants par femme en ville et de 6,5 enfants en milieu rural.

Certaines mamans remarquent que ces multiples grossesses les rendent moins productives. "Quand je n’avais pas encore beaucoup d’enfants, je pouvais faire deux plantations de maniocs et de bananes par an. Mais, les grossesses m’ont affaiblie. Et, avec le poids de l’âge, je ne pense plus battre ce record"regrette Aline Légnoki.

 

Futurs enfants de la rue ?

Carmen Diansi, 36 ans, déjà mère de six enfants avec lesquels elle partage un studio de 15 m2 environ, vit les mêmes difficultés : "A cause de cette précarité, un de mes fils a mis fin à ses études au cours préparatoire deuxième année (CP2)..." Pour assurer la survie de sa famille, Carmen, dont le mari habite dans une autre localité et ne travaille pas, est contrainte de tresser des clientes. Elle gagne entre 1 000 et 2 000 Fcfa (entre 1,50 et 3 €) par coiffure.

"Avoir trop d’enfants empêche la femme de s’épanouir qu’elle soit citadine ou rurale", résume une infirmière de l’ACBEF qui a requis l’anonymat. Une conception qui est encore loin de faire l’unanimité… "Dans les villages, un homme avec beaucoup d’enfants est mieux considéré. Si tu fais faillite dans les affaires, tes enfants seront toujours là pour te soutenir", estime par exemple Hélène Ngokouba.

Le grand nombre de naissances semble favorisé par le manque d’informations des couples. "C’est l’une des principales raisons qui poussent certaines femmes à multiplier le nombre d’enfants. La plupart du temps, cela les plonge dans la pauvreté…", regrette Inès Féviliyé, secrétaire générale de l’association Mouvement des mères pour  la paix, la solidarité et le développement.

Du coup, les préjugés contre les moyens de contraception sont tenaces. "Je ne permettrai jamais à ma femme de prendre la pilule, car cette dernière rend stérile !"croit savoir un journaliste qui a requis l’anonymat. Marna Mankéné, la trentaine, déjà maman deux fois, a un avis radicalement opposé : "La venue d’un enfant doit être préparée. En dépit du contexte africain qui soutient que les enfants sont synonymes de richesse ou un don de Dieu, il faut aussi tenir compte du coût de la vie. Elle conclut, si les naissances ne sont  pas programmées, le risque est grand que ces bébés deviennent ensuite des enfants de la rue."

 

Flore Michèle Makoumbou



14/08/2014
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