Claudia Haidara Yoka
« Le travail que nous faisons ici commence à voir une visibilité sur le continent et c’est une très bonne chose »
Récipiendaire des Dicalo Awards ( festival panafricain de Cannes) en janvier dernier, de la Sanza de la Foa en février, puis du Trophée de femme leader actuelle dans le domaine de l’éducation et la promotion culturelle à la sixième édition du Trophée International des Femmes Actives d’Afrique (TIFAA) à Niamey au Niger au mois de mars, Claudia Haidara Yoka est l’une des réalisatrices congolaises qui se bat bec et ongles pour la relance du cinéma congolais. Elle a crée en 2002 le Clap (Association congolaise de liaison entre les artistes et la production) et à son actif plusieurs films dont :Bozoba, Manigance (sélectionné au Fespaco 2007), Mères chefs (2009)…Initiatrice des Rencontres Cinématographiques en 2003 avec la collaboration de Bassek Ba Kobbio promoteur du festival Ecrans Noirs, du Cameroun, Idrissa Ouédraogo et Rasmané Ouédraogo du Burkina Faso, Claudia organise depuis 2014 à Brazzaville le festival du film des femmes africaines nommé « Tazama » dont la deuxième édition a eu lieu en janvier dernier.
Prix sur l’éducation et la promotion culturelle. Que représente ce trophée pour toi ?
Claudia Haidara Yoka : C’est une grande fierté à partir du moment où j’ai reçu ce trophée hors de nos frontières. Cela signifie que le travail que nous faisons ici commence à voir une visibilité sur le continent et c’est une très bonne chose.
Quelle a été le critère de sélection ?
Claudia Haidara Yoka : Selon les organisateurs, il semblerait que les critères de sélection soient la diversité, la recherche et éventuellement l’innovation dans ce qu’e l’on fait. Et il a semblé aux animateurs que je sois très active dans pas mal de domaines et que j’arrive à développer des projets qui ne toucheraient pas seulement le Congo, mais intéresseraient aussi les autres pays africains car comme la culture, l’éducation peut aussi s’exporter d’un pays à un autre.
Et quelle est l’innovation en ce qui concerne votre établissement The American Daycare ?
Claudia Haidara Yoka : L’école américaine que je dirige a démarré il y a quatre ans et avec un concept qui à l’époque était novateur puisque nous nous sommes inspirés du système américain avec un cursus complet de la maternelle jusqu'à l’équivalent de la terminale américaine. Chose qui ne s’était jamais fait auparavant ici et surtout nous avons pris pour model une école très connue qui est l’université d’Howard. Ce qui fait qu’en 2011, j’ai été formée par l’université d’Howard pour pouvoir diriger The American Daycare. De même pour que les résultats soient convaincants, les enseignants aussi ont aussi suivi un enseignement pour les permettre de bien s’adapter à ce système. Notre souhait serait aussi de former ou d’accompagner d’autres professeurs qui ne sont pas de notre école. Mais pour arriver à cette étape, il nous faudra l’aide des pouvoirs publics.
Qui fréquente The American Daycare ?
Claudia Haidara Yoka : Sans exagérer, je pense qu’on est 85 % d’expatriés contre 15% des congolais dans les petites classes nommée « After School » qui est le programme d’apprentissage de langue anglaise. The American Daycare répond avant tout aux besoins des expatriés anglophones mais au fil du temps on s’est rendu compte que l’anglais étant parmi les langues les plus parlée à travers le monde, il y a de plus en de parents français, belges ou italiens qui viennent inscrire leurs enfants et on a en moyenne 15 à 17 nationalités différentes.
Pouvez-vous nous faire un petit bilan de ces quatre années de vie de votre établissement ?
Claudia Haidara Yoka : Je dirai que c’est positif. Dans l’enseignement américain, on a un système de notation nommé GPA (grade point average) et donc lorsque vous obtenez un GPA de 3 à 3,5 sur 4, vous pouvez être admis dans à peu près n’importe quelle université américaine. Et depuis qu’on a lancé notre école, nos élèves ont presque tous un GPA supérieur à 3,5. Ce qui veut dire qu’ils sont entre guillemet solvables pour intégrer n’importe quelle université américaine. Je ne suis donc pas inquiète quant à leur avenir estudiantin. Maintenant, il faut être honnête sur quelque chose, nous ne disposons pas des mêmes moyens financiers que les autres écoles américaines à travers le monde mais nous ne baissons pas les bras pour qu’American Daycare soit une référence dans le milieu de l’éducation tant au niveau national qu’international.
Une belle image pour l’enseignement au Congo quand les sondages disent que le système éducatif au Congo est en plein régression ?
Claudia Haidara Yoka : Absolument, nous proposons un programme riche et innovant sur la place mais faute de mesures d’accompagnement on n’a pas encore pu mettre en place une activité qui nous tient à cœur : les foires scientifiques comme le font les écoles américaines. Mais nous disposons d’un club de presse et des enfants qui ont entre 8 et 9 ans font de l’initiation à l’astronomie, chose que je n’ai pas encore vue dans nos écoles locales. Notre école est à l’image du Forest Accademy qui est notre partenaire académique en Floride aux Etas Unis. Malencontreusement nous sommes la seule école à ne pas être productive à 100% faute de moyens. Mais ce n‘est pas cela qui va nous empêcher d’avancer. Nous envisageons dans les jours à venir exporter ce concept dans d’autres pays avec lesquels nous sommes déjà en pourparler.
A combien revient en moyenne la scolarisation d’un élève dans votre école ?
Claudia Haidara Yoka : Du CP jusqu'à l’équivalent du bac américain les élèves payent par année 2 millions 500, en fait notre école n’accède pas à 3 millions l’année. Donc par rapport à ce qu’on offre et propose sachant que tout est corrigé depuis les Etas Unis, diplômes, bulletins, je pense que ces frais suffisent largement. Il est aussi vrai, qu’en Afrique l’éducation devrait être accessible à toutes les bourses, c’est pour cela nous réfléchissons comment nous pourrons aider des élèves qui ont véritable potentiel mais qui n’auraient pas les moyens d’intégrer notre école en lui octroyant une bourse d’étude.
Quel est le défi de votre école cette année ?
Claudia Haidara Yoka : Le défi aujourd’hui est de passer le relais sur école afin de développer le même concept sur le continent. Pour l’heure, j’ai des visées sur certains pays anglophones ou la demande reste forte pour ce genre d’instruction.
Propos recueillis par Berna Marty
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